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« Variation, diversité, classes équipollentes et DIAMCA dans le réseau dialectal estonien, ou introduction aux dialectes estoniens par le faîte de l'arbre » (2006)

Paris, Etudes Finno-Ougriennes, tome 38, pp. 119-158.

La linguistique, comme toute science, est ontogène : elle crée des êtres, ou des entités appartenant à son monde, autant au niveau des catégories d’analyse qu’au niveau de construits plus complexes qui débordent de son monde, comme la notion de dialectes. Cela ne veut pas dire pour autant que ces êtres isolés artificiellement par la linguistique (dialectes, langues, variétés, variables structurales, grammaires, etc.) n’en sont pas moins réels : tout au plus existent-ils dans les limites d’un monde de vérité qu’à chaque fois il convient de définir en fonction du monde de vérités (sociolinguistique, glottopolitique, grammairien, typologique, etc.) d’où l’on observe les faits de langue. Mon objectif ici n’est pas de me prononcer contre la notion de dialecte : à la différence de Paul Meyer et de Gaston (cf. Paris, 1888) aux débuts de la dialectologie romane, l’auteur de ces lignes pense, tout comme Charles Camproux (Camproux, 1962 : 760) et bien d’autres dialectologues que les dialectes existent, et que la linguistique aurait tout à y gagner à mieux les décrire et les intégrer dans la quête universaliste que mènent la typologie linguistique et la linguistique théorique et formelle. L’objectif principal de cette contribution est précisément d’apporter des représentations, des matériaux et des arguments en ce sens. On ne pourra intégrer la dialectologie, vieille discipline auxiliaire de la philologie, à la linguistique moderne qu’en acceptant de travailler d’une manière nouvelle les concepts et les représentations à mettre en oeuvre dans l’observation des données empiriques. La diversité – plutôt que la variation - dialectale du fennique méridional, dans les limites de ce qu’il est convenu d’appeler l’espace dialectal estonien, que nous désignerons sous le terme de réseau dialectal (RD), servira d’étude de cas. Non seulement les dialectes existent, mais la linguistique a tout à gagner à les considérer, dans chaque domaine linguistique, comme des langues à part entière, plutôt que comme des dialectes d’une langue. L’individuation ou la caractérisation typologique doit prévaloir sur la subordination glottopolitique ou sociolinguistique dans l’approche grammairienne des faits de langue.