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« Francescato, Labov, Klinkenberg et Sapir à Gorto : les voyelles fortes du frioulan dans tous leurs états structuraux, diatopiques, diffusionnistes et sériels » (2008)

Garabato, Carmen & al. 2009. La romanistique dans tous ses états, Actes du colloque de Béziers, Paris : L’Harmattan, pp.183-208

Je vais utiliser tour à tour dans cette contribution plusieurs approches pour traiter la variation aréologique et diasystémique des réflexes frioulans des voyelles moyennes du latin tardif. Après avoir défini l’objet phonologique qu’est le sous-système de voyelles toniques dit « voyelles fortes » du frioulan (section 1), puis le diasystème des aires phonologiques identifiées par Francescato (section 2), j’aborderai la dynamique aréologique (ou géolinguistique) de ce diasystème. J’utiliserai successivement l’aréologie classique (modèle Ascoli-Bartoli93, section 3) et le modèle de diffusion sémiotique de Jean-Marie Klinkenberg (1997 : 304-309), dans la section 4 du présent article, de manière à mieux les contourner et les déconstruire à l’aide de l’analyse sérielle (modèle Boas- Sapir, section 5). L’objectif de cette recherche est de contribuer à la synergie entre dialectologie et typologie linguistique (cf. Kortmann 2003), tout en offrant, par le biais d’un maniement kaléidoscopique des objets phonologiques et aréologiques, une perspective sur le traitement « dans tous ses états » d’un problème de philologie. Les questions que soulève la matrice diasystémique des voyelles fortes du frioulan du tableau 1 s’apparentent à un jeu de casse-tête analogue à un Rubik’s Cube, ces cubes dont chaque face présente initialement 9 cases de quatre couleurs qui s’avèrent extrêmement difficile à recomposer en quatre surfaces de couleurs unies une fois qu’on les a mélangées en faisant pivoter les tranches. Il est relativement aisé de faire tourner des objets linguistiques dans un prisme afin de les faire apparaître « dans tous leurs états » quand on s’attache à décrire une phénoménologie limitée à une série de faits bien circonscrits dans un sous-système au sein d’une composante. Il est moins aisé de démêler les états successifs de la matrice initiale (le latin tardif), qui ont pu donner lieu à la diversification observable dans un réseau dialectal. C’est le cas avec le sous-système des voyelles moyennes latines en rhéto-roman en général, en frioulan en particulier. L’objectif est donc d’alimenter une réflexion sur les mécanismes de différenciation structurelle d’un paradigme au sein d’un diasystème roman. Il va de soi que les données de Frau (1984) et de Francescato (1966), qui alimentent cette démonstration, ne représentent qu’un aspect, sujet à un fort réductionnisme, de la complexité des faits de langue décrits, parfaitement lissés et presque « trop beaux pour être vrais » tels qu’ils apparaissent dans les manuels. La méthode n’en reste pas moins valide dans ses prémisses et dans ses mécanismes argumentatifs, même si le détail des faits mérite d’être constamment révisé, vérifié et remis en cause par le croisement de multiples sources, par la comparaison avec des atlas linguistiques comme l’ALI, l’AIS et l’ALD94, ainsi que par cette voie irremplaçable d’accès à la connaissance empirique que sont les enquêtes de terrain.